Être prof à l’UQAC en 2022 : et après? (numéro spécial)

Dessin par Benoît Melançon, École NAD / UQAC

Sommaire du numéro

Introduction

Alors que la crise macrosociale liée à la pandémie de COVID-19 semble lentement mais assurément se résorber, il peut être temps de prendre conscience et d’objectiver notre vécu de professeur·e, ici, à l’UQAC. En effet, certaines pratiques instaurées pendant la pandémie semblent vouloir demeurer même après celle-ci, notamment l’enseignement à distance, le télétravail et les rencontres par Zoom ou Teams. Il est donc urgent de réfléchir collectivement au bilan que nous pouvons tirer de cette pandémie pour notre travail de professeur·e à l’UQAC : qu’est-ce que nous voulons conserver, de quelle manière et à quel prix?

Car la pandémie de COVID-19 a des conséquences dans toutes les sphères de la société et l’université n’y échappe pas. Au-delà de l’adaptation en catastrophe des formules pédagogiques habituelles à une formation à distance, les universités sont bien plus largement bouleversées et sortiront vraisemblablement transformées de ce contexte sociosanitaire. Or, au cœur de l’université se trouvent bien sûr les étudiant·es, mais également les professeur·es. Être professeur·e d’université en ce moment signifie vivre une multitude d’adaptations qui concernent chaque dimension de la tâche comme en témoignent les articles réunis dans ce numéro spécial.

Sabrina Tremblay, du Département des sciences humaines et sociales ouvre d’ailleurs ce numéro avec un texte présentant fort justement le sentiment de vertige ou d’irréalité qui a pu nous habiter alors que nous avons commencé à réaliser toutes nos tâches (enseignement, recherche, services aux communautés) depuis notre domicile. Cette concentration spatiale a fait disparaître les frontières habituelles: travail/famille, privé/public, jour/nuit, semaine/weekend… Dans le même esprit, Stéphane Allaire, du Département des sciences de l’éducation, nous propose ensuite un texte dans lequel il constate bien les ambiguïtés de cette crise, à la fois source de deuils, de craintes et de menaces mais aussi d’opportunités et d’espoir.

En regardant rétrospectivement les deux dernières années, on pense d’abord à l’enseignement bien sûr qui a dû se faire, de gré ou de force, à distance pour la majorité d’entre nous. Et là, les avis sont partagés. Plusieurs collègues expliquent dans ces pages comment ils sont parvenus avec succès à adapter non seulement leurs techniques éducatives, mais aussi leur approche pédagogique et leur philosophie de l’apprentissage. Parmi ces “conversions” réussies, Luc Vaillancourt nous parle des effets impressionnants sur la visibilité de son enseignement (et de l’UQAC) que permet la diffusion sur YouTube de son cours de premier cycle en littérature. On perçoit aussi tout le travail que cette médiatisation a dû nécessiter. Également, Benoît Melançon (que nous remercions chaleureusement au passage pour l’illustration coiffant ce numéro!) nous présente la transposition médiatique de l’un de ses cours aux étudiants et étudiantes de l’École NAD / UQAC: le modèle de La soirée du Hockey l’a inspiré, lui et un collègue, à mettre en scène différemment l’un des cours d’introduction à l’histoire de l’image numérique.

Deux professeurs par contre nous rappellent combien cette situation est « anormale ». C’est d’ailleurs le titre de l’article de Mathieu Fiset, du Département des sciences appliquées, qui dresse une liste de qui a changé et de ce qui peut nous manquer, en particulier pour celles et ceux qui ont fait leur entrée en fonction dans ce contexte difficile. Mustapha Fahmi, qui enseigne au Département des Arts, des lettres et du langage, va plus loin en décrivant la modalité actuelle d’enseignement à distance comme un pis-aller, mais certainement pas comme un modèle vertueux.

Si l’enseignement a été profondément transformé par cette pandémie, la recherche également. En particulier les projets qui exigeaient une intervention ou une expérience sur le terrain et avec des groupes d’individus. Mais certains projets ont pu se réaliser quand même! Un article collectif rédigé par des collègues du Département des sciences de la santé (Tommy Chevrette, Laurie Simard, Martin Lavallière et Julie Bouchard) présente les ingrédients qui ont permis à leur projet de recherche en milieu scolaire de se réaliser en pleine pandémie.

Les collègues qui exercent un mandat de direction de programme, de module ou d’unité ont été au cœur des adaptations successives requises par les consignes sociosanitaires. Entre l’arbre et l’écorce, les directions d’unités pédagogiques ont souvent souffert de ne pouvoir répondre aux besoins des étudiants et étudiantes, mais des innovations ont aussi émergé. C’est ce que nous présente Bruno Bouchard dans son texte décrivant toutes sortes de techniques développées au module d’informatique et de mathématique pour maintenir un travail collaboratif malgré la distance.

Enfin, un texte collectif interdisciplinaire (Samuel Julien, Christiane Bergeron-Leclerc, Julien Bousquet, Martin Lavallière) propose des moyens pour favoriser la santé et le mieux-être au travail des professeures et professeurs qui intègrent travail à la maison et au bureau. Ces moyens concernent autant la santé physique que mentale et ne semblent pas très compliqués à mettre en place. Leur effet pourrait par contre être bien réel et rapide.

Car, on ne peut se le cacher, la situation actuelle qui s’étire sur plusieurs années peut être très largement vécue comme une adaptation douloureuse, chronophage et énergivore. Que l’on regarde le côté positif ou négatif, le grand nombre de ces adaptations exigées en une si courte période, dans un contexte social global très difficile, laisse craindre une grande fatigue mentale, physique et morale de la part de chaque membre du corps professoral. Et aussi un isolement, une destruction communautaire du fait de la disparition des lieux d’échanges, de rencontre et de reconnaissance. Même si encore une fois, ce numéro montre les adaptations rapides dont nous sommes capables.

Dans cette situation, ce numéro spécial apparaît comme une participation à un effort de soutenir le sentiment de communauté, de corps professoral, d’Université. Certes, nous ne sommes pas tous et toutes d’accord sur le sens de cette crise et sur son devenir. Mais nous sommes au moins d’accord sur nos désaccords. Et c’est ce qui nous permet de réfléchir – au propre comme au figuré – et de penser. Espérant que vous perceviez dans ce numéro une correspondance inspirante avec votre vécu, nous vous souhaitons une bonne lecture.

Jacques Cherblanc, pour L’équipe éditoriale

Sommaire

Des murs sont tombés

Sabrina Tremblay (DSH)




Zoom et La soirée du hockey

Benoît Melançon (NAD / UQAC)


L’anormale normalité

Mathieu Fiset (DSA)


Enseigner ou enseigner bien?

Mustapha Fahmi (DALL)


Co-créer en période de pandémie : mobiliser pour innover

Tommy Chevrette (DSS)
Laurie Simard (DSS)
Martin Lavallière (DSS)
Julie Bouchard (DSS)



Analyses et perspectives sur la santé et le mieux-être au travail en contexte de COVID-19

Samuel Julien (DSEA)
Martin Lavallière (DSS)
Julien Bousquet (DSEA)
Christiane Bergeron-Leclerc (DSHS)